
26 oct Des chercheurs de l’Institut Pasteur lèvent le voile sur les mécanismes de maintien des cellules souches

De par leur capacité à générer toutes les cellules de l’organisme adulte (la pluripotence), les cellules souches pluripotentes sont la source de grands intérêts thérapeutiques. Leur capacité à rester cellules souches malgré leurs divisions reste cependant très mystérieuse. Comment conservent-elles cette capacité de pluripotence au cours de leurs divisions ?
C’est une partie de ce secret que perce l’équipe de recherche de Pablo Navarro (lauréat FSER 2016), à l’Institut Pasteur, dans une étude publiée dans la prestigieuse revue Nature Cell biology.
« Déchiffrer ces mécanismes est absolument nécessaire pour comprendre comment les cellules souches s’auto-renouvellent ; cela est essentiel pour pouvoir mieux manipuler ces cellules à fort potentiel médical », déclare Pablo Navarro, directeur de l’équipe de recherche qui vient de publier cette nouvelle étude.
La problématique est que ces cellules doivent transmettre à leurs cellules filles non seulement leur information génétique mais aussi le programme précis de fonctionnement du génome, la liste des gènes actifs et inactifs. Les mécanismes permettant ce transfert d’information dit épigénétique dans les cellules souches restaient très mal compris.

Images représentatives de 7 embryons qui ont subi deux micoinjectons indépendantes (EsrrbtdTomato + GFP mRNAs).
Dans toute cellule, l’activité des gènes est directement contrôlée par des protéines appelées « facteurs de transcription » ; ces protéines reconnaissent des petites séquences d’ADN et, en s’y fixant, activent ou répriment l’activité des gènes avoisinants. Or, pour garantir que le matériel génétique soit équitablement distribué entre les deux cellules filles pendant la division cellulaire (mitose), l’ADN est fortement condensé et, par conséquent, les facteurs de transcription ne peuvent plus reconnaître leurs séquences cible et sont généralement délocalisés. En d’autres termes : pendant la mitose l’action des facteurs de transcription est interrompue et les mécanismes permettant aux cellules filles de réactiver les gènes appropriés sont encore mal compris.

Les chercheurs de l’Institut Pasteur ont montré que contrairement à ce qui se produit pour la plupart des facteurs de transcription, un des facteurs de transcription régulant l’auto-renouvellement et la pluripotence des cellules souches, Esrrb, reste arrimé sur ses cibles génétiques pendant la mitose. Cette observation, jamais réalisée auparavant dans le domaine des cellules souches, ouvre de nombreuses perspectives pour mieux comprendre leur biologie. En particulier, malgré leur capacité inégalée pour faire des copies d’elles-mêmes, il semblait jusqu’à présent que les cellules pluripotentes ne présentaient pas une forte dépendance vis à vis des mécanismes de régulation épigénétique plus classiques.
Les chercheurs de l’Institut Pasteur ont montré que contrairement à ce qui se produit pour la plupart des facteurs de transcription, un des facteurs de transcription régulant l’auto-renouvellement et la pluripotence des cellules souches, Esrrb, reste arrimé sur ses cibles génétiques pendant la mitose. Cette observation, jamais réalisée auparavant dans le domaine des cellules souches, ouvre de nombreuses perspectives pour mieux comprendre leur biologie. En particulier, malgré leur capacité inégalée pour faire des copies d’elles-mêmes, il semblait jusqu’à présent que les cellules pluripotentes ne présentaient pas une forte dépendance vis à vis des mécanismes de régulation épigénétique plus classiques.
En conclusion, le travail dirigé par Pablo Navarro vient donc combler une lacune conceptuelle importante, puisque, en maintenant son activité de liaison à l’ADN pendant la mitose, « Esrrb permettrait aux cellules filles d’hériter non seulement de l’information génétique de leur cellule mère, mais aussi du programme à exécuter pour garder leur identité biologique » explique Nicola Festuccia, premier auteur de la publication.
Comprendre les bases moléculaires du transfert mitotique d’information épigénétique est essentiel tout aussi bien sur le plan fondamental qu’appliqué. En effet, cela permettra de mieux utiliser les cellules souches dans diverses stratégies de médecine régénérative ou de thérapie cellulaire. Par ailleurs, « la compréhension de ces mécanismes pourrait aussi illuminer de nouvelles pistes d’étude de processus pathologiques basés sur des divisions cellulaires non-contrôlées, tels que le cancer, où il est de plus en plus clair que des dysfonctionnements dans le stockage ou l’utilisation de l’information épigénétique sont directement impliqués », rappelle Pablo Navarro.
Ce travail est soutenu par l’Institut Pasteur, le CNRS, ANR Laboratoire d’Excellence Revive (Investissement d’Avenir; ANR- 10-LABX-73), EMBO Long Term Fellowship (ALTF 876-2013), et Marie-Curie Intra-European Fellowship (EFIMB – 626705).
Nicola Festuccia, Agnès Dubois, Sandrine Vandormael-Pournin, Elena Gallego Tejeda, Adrien Mouren, Sylvain Bessonnard, Florian Mueller, Caroline Proux, Michel Cohen-Tannoudji and Pablo Navarro. Mitotic binding of Esrrb marks key regulatory regions of the pluripotency network. Nature Cell Biology, 2016 DOI: 10.1038/ncb3418