Introduction
Les cellules germinales sont les seules cellules transmises d’une génération à la suivante et peuvent être considérées comme étant immortelles. Elles produisent des cellules hautement spécialisées appelées gamètes, qui portent l’information génétique et cytoplasmique définissant une espèce donnée. Ces dernières peuvent initier la formation d’un organisme complet. La compréhension des mécanismes de développement des cellules germinales est non seulement d’un intérêt médical crucial pour la médecine reproductive, mais elle est aussi très importante pour l’élucidation des processus de l’évolution des formes animales au cours des générations. Les femelles drosophiles adultes présentent des avantages clés en tant que système modèle pour étudier le développement des cellules germinales. Dans chaque ovaire se trouvent des cellules souches germinales (CSGs) qui produisent des œufs (les gamètes femelles) tout au long de la vie de la femelle. Il est donc possible de suivre le développement complet des cellules germinales du stade de cellule souche jusqu’à l’œuf fertilisé dans une seule mouche. Les généticiens de la drosophile contribuent d’autre part à produire des outils sans cesse plus précis pour contrôler la fonction de chaque gène dans le génome. Il est ainsi possible d’éteindre un gène spécifique à un moment précis dans les cellules germinales.
Chez les femelles, les CSGs sont localisées à l’apex antérieur d’une structure spécialisée appelée le germarium. Les CSGs s’y divisent asymétriquement pour y produire une CSGs qui continue de se renouveller et un cytoblaste différencié. Le cytoblaste entreprend alors quatre cycles de divisions asymétriques avec une cytokinèse incomplète, produisant ainsi un cyste de 16 cellules germinales interconnectées par des ponts cytoplasmiques. Une seule de ces cellules devient l’œuf et entreprend la meiose, alors que les 15 autres deviennent des cellules nourricières polyploïdes. Bien qu’il représente un excellent système modèle pour étudier la biologie des cellules souches, le germarium reste peu étudié.
Division asymétrique dune cellule souche de lignée germinale. Wcd::GFP (en vert) ségrège de manière asymétrique. Le fusome est en bleu et l’ADN mitotique en rouge.
Réalisations
Au cours des dernières années, Jean-René Huynh et son laboratoire ont permis les avancées suivantes sur la biologie des cellules souches de la lignée germinale :
1/ Ils ont proposé que la biogenèse des ribosomes est un paramètre important pour l’homéostasie des cellules souches. Ces résultats ont par la suite été confirmés et étendus à d’autres organismes et systèmes modèles (voir Le Bouteiller et al. 2013 et Zhang, Q. et al , Science 2014).
2/ Ils ont découvert une nouvelle fonction de la CyclinB-Cdk-1 au cours de l’abscission, qui se déroule après le début de l’anaphase, alors qu’il était auparavant admis que CycB était alors entièrement dégradé (Mathieu et al ., 2013). Les fonctions tardives de CycB ont été confirmées pour la reformation de l’enveloppe nucléaire. (Afonso et al)
3/ Alors qu’il était communément admis que les chromosomes homologues étaient appariés dans chaque cellule de la drosophile, ils ont montré que ce n’était pas le cas dans les cellules souches de la lignée germinale. Les chromosomes homologues s’apparient en fait au cours des divisions mitotiques qui précèdent l’entrée « officielle » en méiose (Christophorou et al, 2013, et aussi Joyce et al., 2013 et Cahoon and Hawley, 2013).
Projets
Jean-René et son équipe ont entrepris une approche génétique forward pour identifier les gènes qui contrôlent le développement des cellules souches, le cycle cellulaire, la détermination du destin cellulaire et la polarité cellulaire. Ils ont muté de manière alétatoire le génome et généré des lignées mutantes défectueuses dans la formation de la lignée germinale. A l’aide de cette collection de mutants, ils explorent les questions suivantes :
1/ Comment la croissance des cellules souches de la lignée germinale est-elle régulée ? Les CSGs se divisent activement et ont besoin de retrouver leur volume et leur masse d’origine rapidement après chaque division. Jean-René Huynh et son équipe ont découvert que des méchanismes spécifiques étaient impliqués.
2/ Comment le nombre de division des cellules germinales est-il limité à 4 dans le germarium ? Jean-René Huynh et son laboratoire ont identifié des mutations dans les gènes de drosophile Aurora-B et Cyclin-B qui augmentent ou diminuent le nombre de divisions.
3/ Comment les chromosomes homologues se retrouvent-ils au cours de la méiose ? Ils étudient le rôle potentiel du cytosquelette cytoplasmique dans la régulation de l’organisation des chromosomes au cours des étapes précoces de la méiose dans le germarium.
4/ Comment le matériel génétique de la lignée germinale est-il protégé des dégâts infligés à l’ADN ? L’information génétique contenue dans les gamètes femelles doit être transmis sans dommages à la générqtion suivante. Jean-René Huynh et son groupe étudient une nouvelle classe de petits ARNs non codants qui protègent le génome de transposons ADN.