Introduction
Les mécanismes moléculaires à la base des décisions sur le destin des cellules et leur reprogrammation sont au cœur de toutes les décisions du développement d’un organisme. La plus spectaculaire de ces reprogrammations se produit probablement au cours du développement des cellules reproductrices (les cellules germinales). C’est la raison pour laquelle les cellules germinales et les cellules souches pluripotentes qui en ont été dérivées se sont révélées inestimables pour disséquer les mécanismes contrôlant la plasticité développementale ou la pluripotence. Le petit vers C. elegans représente un système modèle commode pour disséquer et comprendre les mécanismes de ce phénomène commun à la plupart des animaux.
Réalisations
Les travaux du laboratoire de Rafal Ciosk ont démontré que la pluripotence des cellules germinales était contrôlée notamment par la régulation post-transcriptionnelle médiée par GLD-1, un membre de la famille STAR des protéines de liaisons à l’ARN (RBPs). Ils ont aussi établis qu’une pluripotence prématurée dans la lignée germinale s’accompagnait du début de l’activation du génome embryonnaire (EGA). Cette observation les a amené à utiliser le début précoce d’EGA dans la lignée germinale comme un marqueur pour identifier des nouveaux régulateurs de pluripotence. Dans un crible génétique non ciblé, Rafal Ciosk et son équipe ont identifié plusieurs mutants chez lesquels l’EGA se déroule précocément dans la lignée germinale. Ces mutants sont de deux catégories.
Ceux de type A ont une EGA précoce et forment par la suite une tumeur (un tératome). Leurs travaux ont permis d’identifier la localisation des mutations responsables de ce phénomènes : LIN-41. Ce gène est connu comme appartement à la voie de signalisation « hétérochronique », qui contrôle le tempo des transitions développementales dans les cellules non germinales (les cellules somatiques). LIN-41 est une protéine de liaison à l’ARN de la famille TRIM-NHL, et est la cible du let-7 miRNA. Ces résultats montrent donc que LIN-41 contrôle le tempo de développement et des cellules somatiques et des cellules germinales. Les études structure-fonction de l’équipe de Rafal Ciosk indiquent cependant que ces processus sont médiés par des mécanismes moléculaires différents. Leur but est maintenant de disséquer les mécanismes moléculaires précis et d’identifier les cibles pertinentes de LIN-41.
Les mutants de type B induisent une EGA mais ne forment pas de tératome. Dans ces mutants, l’EGA est donc découplée de la différenciation en tératome observée dans les mutants gld-1 et lin-41, permettant ainsi la dissection de la hiérarchie des événements sous-tendant la reprogrammation des cellules germinales en cellules pluripotentes. Rafal Ciosk et son équipe ont déjà pu identifier un gène qui, une fois, muté, entraîne ce phénotype. Leurs recherches futures tendront à identifier les mécanismes moléculaires impliqués.
Implications
Jusqu’à présent, les recherches de Rafal Ciosk ont donc dévoilé des acteurs de la régulation de la pluripotence qui sont des répresseurs cytoplasmiques. En disséquant leurs cibles, il travaille maintenant à la compréhension des mécanismes impliqués dans la reprogrammation. En complément de cette approche, il mène des cribles pour identifier des activateurs de l’EGA et s’attend à identifier des facteurs régulés par GLD-1 et LIN-41, potentiellement directement impliqués dans le remodelage transcriptionnel du noyau. Si elle s’avérait fructueuse, cette approche mènerait pour la première fois dans le monde animal à un panorama complet des voies de signalisation contrôlant la pluripotence au cours de la transition de l’oocyte à l’embryon.
Dernière mise à jour : 31 juillet 2014